« Je crois en un seul Dieu, Créateur du ciel et de la terre»

Le vertige que peut donner par exemple à un enfant la contemplation du ciel et de son infinitude (car les adultes ont autre chose à faire que de s'occuper de choses sérieuses ...) est une de ces premières expériences où l'être humain prend conscience qu'il y a un seuil qu'il ne peut franchir : au-delà de ce qui est, qu'y a-t-il ? Rien ? Mais rien est déjà quelque chose... Et nous, qui sommes complètement circonscrits par l'espace, avons de la peine à concevoir une absence de limite. L'espace est une réalité plus sensible et plus facile à appréhender, mais pour le temps, la difficulté est peut-être plus grande encore : comment penser avant le temps et après le temps, ou plutôt hors du temps (puisque les notions d'avant et d'après n'y ont plus de sens) ?
C'est uniquement par le mode propre de la foi que l'être humain peut entrer en relation avec Celui qui habite l'en-deçà ou l'au-delà du temps et de l'espace.
Dire que Dieu est au commencement et au terme de tout, c'est être encore prisonniers de notre besoin de limites, voilà pourquoi le Verbe éternel de Dieu se définit dans le Livre de l'Apocalypse comme « l'Alpha et l'Oméga », par la première et la dernière lettre de l'alphabet grec. Dieu était avant ce qui est pour nous le commencement du temps et sera après la fin du temps : il « est », « Je suis celui qui est » se révèle-t-il à Moïse ; de la même façon son être et sa puissance s'exercent sur les espaces infinis qui ne connaissent aucune limite...
De là vient notre difficulté à concevoir que Dieu puisse connaître notre avenir sans en déduire que nous ne sommes pas libres de le construire. Dieu a le temps déployé devant lui comme un immense rouleau que l'homme écrit jour après jour avec sa propre liberté : je peux choisir demain d'aller à droite ou à gauche mais Dieu sait depuis toujours ce que je ferai demain. Alors suis-je conditionné ? Absolument pas ! Jusqu'au dernier moment je dispose de mon libre arbitre, Dieu ne me manipule pas comme une marionnette et j'ai tout pouvoir aujourd'hui de tout changer pour demain, mais cela, Dieu le sait encore puisqu' hors du temps il le contemple dans un éternel présent. Par analogie avec l'espace, il est comme le pilote d'avion qui contemple en un regard la totalité d'une chaîne de montagne dont le marcheur découvre les vallées les unes après les autres au fur et à mesure qu'il franchit cols et sommets.

Dans l'évocation de l'œuvre créatrice de Dieu, nous sommes sans cesse confrontés à la distance incommensurable qui nous sépare de lui.
La Création est souvent envisagée comme l'œuvre d'un artisan qui fabrique et abandonne ensuite à son propre sort l'objet ainsi sorti de son intelligence et de ses mains. Parler de la Création revient d'ordinaire à se poser la question des origines, or l'œuvre créatrice de Dieu s'étend bien au-delà car elle est une œuvre continue : Dieu ne s'est pas contenté de créer un jour, il crée sans cesse. L'être de Dieu soutient tout ce qui est : que Dieu cesse de le vouloir et ce qui était n'est plus.
Les trois premiers chapitres de la Genèse sont essentiels pour entrer dans la compréhension du dessein créateur de Dieu qui opère par sa Parole et par sa Sagesse, autrement dit par le Verbe éternel et par l'Esprit, « Dieu dit », « Dieu envoie son souffle », ces expressions et tant d'autres éléments encore trouvent leur explicitation avec la révélation de la Trinité opérée par le Nouveau Testament.
Et cette création est le premier acte d'une alliance avec l'homme. L'univers est ordonné et bon, propre à conduire l'être humain qui en est le sommet à une relation libre d'amour. Et cela, dans un projet, à travers un cheminement qui conduit à une perfection ultime à laquelle Dieu nous a destinés.
Il importe alors au plus haut point pour l'homme de connaître la « grammaire » de ce monde, d'en connaître les règles et la destination afin que, s'inscrivant dans cette Loi première, il y trouve la sagesse et la liberté, la joie et la confiance.
Le Péché originel est dans le refus de nos premiers pères d'accepter d'un Autre la loi du bien et du mal et la volonté de s'approprier la maîtrise de ce qu'ils avaient reçu, en mangeant « le fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal ».
Il n'est pas besoin de faire beaucoup d'efforts pour voir comment ce péché nous a marqués et combien les conséquences en demeurent encore aussi funestes.